Briar : la forteresse hors-ligne
Briar a été conçue pour fonctionner même sans Internet. Deux téléphones Android peuvent échanger en Bluetooth ou Wi-Fi direct, et quand Internet est disponible, les communications passent par le réseau Tor. Ce modèle en fait un outil exceptionnel pour les contextes de censure ou de coupure réseau : manifestations, zones de guerre, crises politiques. Mais cette robustesse a un coût :
- il faut installer une application Android (absence sur iOS) ;
- les communications sont limitées à un petit groupe ;
- la synchronisation via Tor est lente et énergivore ;
- l’expérience utilisateur reste rudimentaire, sans audio/vidéo ni intégration web.
Briar reste donc un outil d’urgence, une messagerie de résistance, pas une messagerie du quotidien.
iCanText : la confidentialité web-native
iCanText part du même principe de résilience, mais l’étend à un écosystème beaucoup plus large. Ici, pas d’application à installer : le navigateur suffit. L’outil s’appuie sur WebRTC et un protocole maison de routage en oignon (onion routing) implémenté en JavaScript, offrant un chiffrement de bout en bout et une distribution du trafic entre pairs.
Chaque navigateur devient un nœud du réseau. Les messages, encapsulés dans plusieurs couches de chiffrement, traversent une série de navigateurs relais avant d’atteindre leur destinataire. Aucun serveur permanent ne gère les échanges. Même les rôles de « portiers » (nœuds facilitant la connexion de nouveaux appareils) sont dynamiques, temporaires et équitablement distribués entre les membres du réseau.
Un vrai modèle sans serveur, pas seulement sans cloud
Briar se présente souvent comme une messagerie “sans serveur”. Mais techniquement, elle dépend encore de rendez-vous onion services sur Tor, ce qui signifie des services persistants (hébergés par les pairs eux-mêmes), et donc une exposition possible si un nœud est compromis ou surveillé.
iCanText, lui, ne conserve rien nulle part :
- aucune base de données centrale,
- aucun service d’intermédiation permanent,
- aucune identité liée à un store ou à un compte utilisateur.
Chaque session est éphémère et distribuée. Si un nœud disparaît, le réseau s’autorépare. Et si un utilisateur souhaite l’isoler davantage, il peut reconfigurer son point d’entrée sans dépendre d’un opérateur tiers.
Confidentialité : l’anonymat d’usage, pas seulement du contenu
L’une des différences majeures entre les deux approches se situe là :
- Briar protège les messages (chiffrement E2E) et masque les routes grâce à Tor.
- iCanText protège aussi l’anonymat d’usage : personne ne sait que vous utilisez l’application.
Aucune installation sur un store, aucune dépendance à Google Play Services ou à des push notifications centralisées. Le simple fait d’utiliser Briar identifie un compte Google ayant téléchargé l’app, ce qui peut suffire à éveiller la curiosité d’un régime autoritaire. iCanText, étant une webapp, laisse zéro empreinte d’installation : aucune inscription, aucun package, aucun identifiant utilisateur.
Performance et expérience : l’avantage du web
Grâce à WebRTC et à un système de relais pair-à-pair, iCanText offre une expérience quasi instantanée, compatible avec audio, vidéo et transferts de fichiers. Le tout repose sur une cryptographie robuste (ECDH/ECDSA, AES-GCM, PBKDF2 100k itérations) et une rotation automatique des clés de session.
Là où Briar subit la latence inhérente à Tor et aux connexions intermittentes, iCanText bénéficie de la rapidité du protocole WebRTC tout en maintenant le cloisonnement des métadonnées grâce à son routage multi-sauts chiffré.
Résilience et anti-Sybil : la scalabilité maîtrisée
Dans les réseaux pair-à-pair, le risque classique est l’attaque Sybil (inonder le réseau de fausses identités pour observer ou manipuler le trafic). iCanText intègre déjà des mécanismes anti-Sybil au niveau de son protocole : élection probabiliste de portiers, rotation fréquente des rôles, limitation du nombre de connexions par pair et validation croisée entre voisins.
Ainsi, même si un navigateur compromis rejoint le réseau, son impact reste minime : il n’a qu’une vision très partielle du graphe global et ne peut corréler ni le contenu ni les participants d’une conversation.
Philosophie : le réseau comme bien commun
Briar est un outil de survie numérique : fermé, robuste, minimaliste. iCanText est une infrastructure commune : ouverte, modulaire et adaptable. Les deux partagent la même philosophie, redonner le contrôle à l’utilisateur, mais iCanText le fait à l’échelle du Web tout entier.
L’application démontre qu’on peut concilier confidentialité forte, accessibilité et performances modernes sans dépendre d’aucun acteur central. C’est une approche plus horizontale, plus scalable, et potentiellement plus compatible avec un usage grand public.
Conclusion : de la messagerie de résistance à la messagerie universelle
Briar a ouvert la voie : il a prouvé qu’une communication totalement décentralisée était possible. iCanText, en 2025, franchit l’étape suivante : il prouve que cette communication peut être universelle, fluide et invisible.
Là où Briar reste un outil pour survivre aux coupures, iCanText devient un outil pour vivre la confidentialité, sans compromis sur la simplicité ou la vitesse.